4.7 Mesure de la qualité des rôles
Présentation et sommaire
La mesure de la qualité des rôles d’évaluation réfère à l’application de procédures permettant de jauger, par des résultats concrets, l’atteinte d’objectifs attendus du processus d’évaluation municipale. D’ordre administratif ou professionnel, ces objectifs peuvent être prescrits par la loi ou la réglementation.
Avant les années 1970, le contrôle de la qualité des rôles d’évaluation relève individuellement des responsables locaux. La gestion responsable des subventions à réalisation de la réforme instaurée en 1977 nécessite alors de mesurer systématiquement la qualité des travaux effectués. En 1980, l’établissement obligatoire de la proportion médiane de chaque rôle constitue le premier indicateur de qualité reconnu, lequel sert ensuite de base aux exigences réglementaires en vigueur depuis 1989. De plus, au cours des années 1990, un ensemble d’indicateurs de performance non réglementés est reconnu pour détecter préventivement les déficiences, ce qui facilite les interventions des responsables concernés.
Procédures initiales de mesure de la qualité : limitées, individuelles et facultatives
Exception faite d’une disposition du Code municipal de 1871 prévoyant l’uniformisation des rôles d’évaluation locaux aux fins de leur utilisation par le conseil de comté[1], les dispositions législatives applicables à l’évaluation foncière sous le régime britannique et la Loi des cités et villes ne comportent pas de procédure pour mesurer la qualité des rôles d’évaluation. Pendant environ 100 ans, ce domaine est sous la responsabilité individuelle de chaque municipalité locale (au nombre de 1700 en 1971).
Ainsi, durant cette longue période, les vérifications de cohérence préalables au dépôt des rôles d’évaluation relèvent seulement du choix des estimateurs[2] locaux. Il en est de même pour la mesure du niveau des évaluations déposées, au regard de la valeur réelle des immeubles, exception faite de l’uniformisation pour fins scolaires[3]. De plus, la révision des rôles est confiée directement au conseil municipal qui peut, même en absence de plainte, rectifier toute évaluation de biens qu’il juge s’écarter leur valeur réelle.
D’abord soulevées par la Commission Tremblay en 1956, puis davantage documentées par la Commission Bélanger en 1965, d’importantes lacunes entachent la qualité des rôles d’évaluation alors en vigueur, compromettant ainsi toute possibilité de réforme de la fiscalité municipale. On reproche notamment :
- qu’une trop grande hétérogénéité caractérise les méthodes d’évaluation municipale, généralement arbitraires ou défectueuses sauf pour certaines municipalités plus importantes;
- que les évaluations inscrites aux rôles ne respectent pas l’exigence légale de correspondre à la valeur réelle et n’en représentent que de trop faibles pourcentages[4];
- que cela relève davantage de l’incompréhension ou de la négligence, que de la complexité de la tâche.
Par ailleurs, à cette époque, divers moyens de mesure de la qualité des rôles circulent parmi les praticiens de l’évaluation municipale, en provenance d’agglomérations urbaines canadiennes et américaines. On note particulièrement :
- l’application suggérée d’une étape de « contrôle des valeurs » avant le dépôt du rôle, fondée sur l’analyse comparative des prix de vente et des nouvelles évaluations, ce qui permet de vérifier le niveau du rôle par rapport au marché, soit globalement ou par segment;
- l’usage d’un indice de disparité, appelé « indice de Russell », notamment utilisé en matière d’uniformisation pour fins scolaires. Il indique l’ampleur des déviations moyennes, mesurées entre les valeurs au rôle et les prix de vente correspondants.
Instauration de procédures universelles pour mesurer la qualité des moyens utilisés
À compter de 1972, le gouvernement du Québec procède aux changements requis pour assujettir toutes les municipalités aux mêmes règles d’établissement des évaluations, de façon à obtenir des résultats comparables partout. D’abord, la Loi sur l’évaluation foncière (LEF) réunit toutes les dispositions relatives à l’évaluation foncière et regroupe régionalement diverses autorités compétentes en ce domaine (3 communautés urbaines et 71 conseils de comté). S’en suit une importante réforme de l’évaluation foncière, est instaurée à compter de 1977 par :
- une ordonnance ministérielle exigeant des municipalités qu’elles confectionnent leur premier rôle « de nouvelle génération » au plus tard pour 1984, selon un cheminement à suivre à cette fin, imposé par le Règlement numéro 1;
- l’exigence faite aux évaluateurs municipaux de se conformer aux consignes de l’édition 1976 du Manuel d’évaluation foncière du Québec (MEFQ) et d’utiliser les formulaires qui y sont décrits ;
- le déploiement d’un programme d’aide financière à l’implantation des nouveaux rôles ainsi exigés.
Alors que la LEF de 1972 continue de prescrire que les évaluations municipales doivent représenter la valeur réelle[5] des immeubles évalués, aucune disposition ne vise alors à ce que l’atteinte de cet objectif de résultat soit mesurée par quiconque[6].
Par contre, afin d’assurer le suivi de la réforme à implanter et une gestion responsable du programme d’aide qui y est associé, le ministère des Affaires municipales (MAM) vérifie systématiquement, de 1977 à 1985 et pour toutes les municipalités, l’application des moyens prescrits par la réglementation. Ne jaugeant pas l’aspect professionnel des travaux ni la justesse des évaluations, cette surveillance dite « administrative » du MAM consiste cependant à :
- vérifier l’existence de la documentation à la base de tout rôle de nouvelle génération, et surtout, sa conformité aux exigences du règlement et du MEFQ. Trois fichiers obligatoires sont examinés à partir d’un échantillon de chacun : le fichier central des données du marché, la matrice graphique et les fiches de propriété;
- informer les responsables concernés (évaluateur et municipalité responsable) de la nature des correctifs requis, le cas échéant;
- procéder, sur la base des constats effectués, soit au versement des subventions prévues à ce sujet, soit aux retenues d’argent afférentes aux correctifs requis.
En 1984, un outil de vérification de la qualité administrative des rôles de nouvelle génération est intégré à la deuxième édition du MEFQ (Annexe 6-C – Algorithmes de diagnostic du fichier 2.6.4). À titre facultatif, ce guide expose un système de diagnostic composé de tests intra-champ, inter-champs et inter-dossiers, à appliquer par les évaluateurs au fichier du rôle d’évaluation pour en augmenter la qualité et la fiabilité. Il est retiré du MEFQ en 1994, sans avoir été révisé ni mis à jour.
Première mesure universelle de la qualité des résultats : la proportion médiane
Une fois la réforme administrative enclenchée, le MAM retient d’établir un constat annuel du niveau de tous les rôles, concrétisant ainsi l’une des recommandations de la Commission Bélanger, à l’effet que tous les rôles soient indexés à la pleine valeur chaque année[7]. Les recherches et analyses effectuées par le MAM permettent ensuite de retenir la médiane comme l’indicateur statistique le plus pertinent à cette fin.
À compter de 1980, la Loi sur la fiscalité municipale (LFM) réunit, en une même loi, de nouvelles dispositions fiscales et celles régissant déjà l’évaluation foncière. Sans remettre en cause les pratiques déjà exigées en ce domaine, la LFM introduit cependant deux changements majeurs quant à la mesure de la qualité des évaluations municipales :
- le niveau du rôle doit être mesuré annuellement au moyen de la proportion médiane (LFM, art. 264). D’abord effectuée par l’évaluateur puis vérifiée par le MAM, cette mesure récurrente du niveau de chaque rôle par rapport à la valeur réelle officialise une mesure objective de son état ;
- les valeurs inscrites au rôle doivent représenter une même proportion de la valeur réelle des propriétés évaluées (LFM, art. 42, al. 2). Cette disposition assure l’équité horizontale entre les évaluations d’un même rôle, mais elle légitime désormais le fait qu’un rôle déposé peut ne pas représenter la pleine valeur réelle des immeubles;
Bien que n’étant pas visé par la LFM, l’écart-type relatif à la médiane est un indicateur statistique alors reconnu pour quantifier l’ampleur de la dispersion des évaluations autour du niveau général mesuré par la proportion médiane.
Publiés par le MAM, les proportions médianes établies pour l’année 1980 démontrent notamment que :
- la moitié des rôles d’ancienne génération ont un niveau à moins de 60% des valeurs réelles, confirmant ainsi la perpétuation de la problématique soulevée en 1965 ;
- le tiers des rôles de nouvelle génération affichent un niveau inférieur à 90%, malgré que ce soient des rôles dits « annuels ».
De 1980 à 1983, l’implantation de la proportion médiane comme mesure officielle du niveau des rôles génère diverses préoccupations d’ordre administratif et professionnel (compréhension, adaptation, délais de traitement, représentativité des ventes utilisées, etc.). Certains reproches concernent particulièrement :
- l’intervention coercitive du MAM dans l’échantillonnage et l’établissement des résultats, jugée inappropriée dans des actes de nature professionnelle;
- le caractère prématuré d’une telle mesure qualitative, introduite avant que tous les rôles de nouvelle génération soient complétés.
Distribution des proportions médianes – Exercice financier 1980
Proportion médiane | Ancienne génération | Nouvelle génération | Total des rôles | |||
Nombre | % | Nombre | % | Nombre | % | |
39% et moins | 323 | 28% | 0 | 0% | 323 | 22% |
40% à 49% | 216 | 19% | 0 | 0% | 216 | 14% |
50% à 59% | 194 | 17% | 1 | 0% | 195 | 13% |
60% à 69% | 151 | 13% | 10 | 3% | 161 | 11% |
70% à 79% | 126 | 11% | 30 | 9% | 156 | 10% |
80% à 89% | 89 | 8% | 71 | 21% | 160 | 11% |
90% à 99% | 35 | 3% | 130 | 38% | 165 | 11% |
100% à 109% | 18 | 2% | 91 | 27% | 109 | 7% |
Plus de 109% | 1 | 0% | 9 | 3% | 10 | 1% |
Total | 1153 | 100% | 342 | 100% | 1495 | 100% |
Bien que n’étant pas visé par la LFM, l’écart-type relatif à la médiane est un indicateur statistique alors reconnu pour quantifier l’ampleur de la dispersion des évaluations autour du niveau général mesuré par la proportion médiane.
Publiés par le MAM, les proportions médianes établies pour l’année 1980 démontrent notamment que :
- la moitié des rôles d’ancienne génération ont un niveau à moins de 60% des valeurs réelles, confirmant ainsi la perpétuation de la problématique soulevée en 1965 ;
- le tiers des rôles de nouvelle génération affichent un niveau inférieur à 90%, malgré que ce soient des rôles dits « annuels ».
De 1980 à 1983, l’implantation de la proportion médiane comme mesure officielle du niveau des rôles génère diverses préoccupations d’ordre administratif et professionnel (compréhension, adaptation, délais de traitement, représentativité des ventes utilisées, etc.). Certains reproches concernent particulièrement :
- l’intervention coercitive du MAM dans l’échantillonnage et l’établissement des résultats, jugée inappropriée dans des actes de nature professionnelle;
- le caractère prématuré d’une telle mesure qualitative, introduite avant que tous les rôles de nouvelle génération soient complétés.
Exigences réglementaires et normatives quant à la qualité des résultats
À compter de 1984, alors que la quasi-totalité des municipalités ont dressé leur premier rôle de nouvelle génération, le Règlement numéro 2 remplace le règlement initial, principalement pour assurer la pérennité de la documentation déjà produite, ainsi que la continuité entre les rôles à venir. Plus particulièrement, ce nouveau règlement s’appuie sur les mesures statistiques instaurées en 1980 pour exiger :
- l’indexation immédiate du rôle lorsque la proportion médiane du rôle précédent est inférieure à 60% ;
- l’équilibration immédiate du rôle lorsque l’écart-type relatif à la médiane du rôle précédent excède 25%.
À partir de 1985, l’effervescence du marché immobilier produit des effets fiscaux indésirables. Pour stabiliser le régime fiscal municipal, la périodicité triennale de dépôt des rôles d’évaluation est graduellement[8] implantée de 1989 jusqu’en 1992. Ce changement législatif s’avère majeur pour les pratiques d’évaluation foncière, particulièrement parce qu’il s’accompagne de nouvelles exigences quant à la récurrence (3 ans ou 6 ans) et aux résultats contenus aux rôles triennaux à être déposés (LFM, art. 46.1).
En 1989 d’abord, la LFM redéfinit l’équilibration du rôle comme une opération ayant pour but d’« éliminer le plus possible les écarts entre les proportions de la valeur réelle que représentent les valeurs au rôle ». Ensuite, à compter de l’année 1990 et après révision en 1994, de nouvelles mesures réglementaires imposent, sous peine de sanctions financières[9], l’atteinte de trois résultats pour qu’un rôle soit considéré comme résultant d’une équilibration :
- la proportion médiane doit se situer entre 95% et 105%;
- l’écart-type relatif ne doit pas excéder un pourcentage plafond, modulé (de 14 à 36%) selon la concentration résidentielle unifamiliale du territoire municipal concerné;
- la différence entre la variation de l’évaluation des propriétés vendues et celle des autres propriétés de même catégorie doit être inférieure à 10%.
Depuis 1990, l’application de ces mesures fait l’objet d’un suivi individuel récurrent par le MAM auprès des intervenants concernés. Ainsi, pour chaque cas où une équilibration est effectuée, la municipalité et l’évaluateur concernés sont avisés soit de la conformité[10] du rôle aux exigences réglementaires qui s’y appliquent, soit de sa contravention à ces exigences, avec les conséquences qui y sont associées.
Depuis 1996, le processus d’équilibration du rôle d’évaluation est documenté au MEFQ[11], lequel prévoit notamment :
- un examen statistique détaillé du rôle en vigueur, menant à établir un plan d’intervention optimal pour respecter les exigences applicables et tout autre objectif pouvant être visé;
- un second examen statistique, effectué avant le dépôt du rôle équilibré, pour en contrôler la qualité et permettre d’y apporter d’éventuels correctifs.
Depuis 1999, ces éléments sont intégrés aux normes de pratique professionnelle des évaluateurs agréés (Règle 20.2.6 de la norme 1999 et point 3.2.11 de celle instaurée en 2013).
Mesure de la qualité des résultats au moyen d’indicateurs multiples
À la suite de la croissance rapide et non uniforme du marché immobilier des années 1985 à 1987, se reflétant ensuite dans les rôles d’évaluation, des hausses brusques de taxation et d’importants déplacements fiscaux sont constatés, particulièrement dans la région montréalaise. De nombreux citoyens et élus municipaux questionnent alors la qualité des rôles d’évaluation, de même que la pertinence d’en fonder le contenu sur la valeur réelle des immeubles, trop variable à leur avis. Cette remise en cause publique de la crédibilité de l’évaluation foncière municipale amène les spécialistes concernés à constater l’absence de vérifications objectives pouvant servir de référence quant à cette discipline professionnelle à caractère probabiliste.
Parallèlement au déploiement des exigences réglementaires applicables au régime des rôles triennaux, le MAM élargit ses recherches et consultations quant à la crédibilité de l’évaluation foncière municipale. En collaboration avec un groupe de praticiens, il développe et publie, en juin 1989, un guide administratif nommé « Système de mesure de la qualité des rôles d’évaluation foncière », destiné à servir d’appui à ses interventions, ainsi qu’à celles des évaluateurs municipaux.
Le premier volet de ce système est composé d’un ensemble de 10 indicateurs visant à démontrer objectivement les performances des rôles d’évaluation foncière au Québec. Fondés sur l’utilisation de données déjà requises aux fins de l’établissement annuel de la proportion médiane et du sommaire de chaque rôle, ces indicateurs de performance :
- concernent l’équité des valeurs (5), la fiabilité de l’inventaire immobilier (1) et la fiabilité des mesures statistiques (4);
- reposent sur des critères universels et connus de tous à l’avance ;
- indiquent chacun l’atteinte ou non d’un seuil de performance normalement attendu ;
- gênèrent, pour chaque rôle étudié, un résultat global exprimé en pourcentage, ce qui facilite les comparaisons.
À compter de 1994, le processus d’évaluation décrit au MEFQ inclut l’application des indicateurs de performance, lesquels y font l’objet d’un chapitre spécifique[12], bien que ceux-ci n’aient aucun caractère réglementaire. Les principes et objectifs en cause y sont présentés et les modalités de calcul à effectuer y sont détaillées.
Jusqu’en 2007, le MAM applique annuellement[13] ces indicateurs à tout rôle comptant au moins 500 unités d’évaluation et en diffuse les résultats aux évaluateurs et aux organismes municipaux concernés. Chacun d’eux reçoit alors les résultats individuels pour chaque rôle sous sa responsabilité, ainsi qu’une compilation des résultats obtenus pour l’ensemble du Québec. Cette diffusion récurrente vise notamment à :
- faire reconnaître une forme objective de démonstration du niveau de qualité des rôles d’évaluation au Québec ;
- favoriser la détection préventive des déficiences[14] et la mise en œuvre de solutions pertinentes par les responsables concernés.
Depuis 2008, l’application des indicateurs de performance en évaluation foncière est laissée à l’initiative des praticiens professionnels de cette discipline.
Résultats des indicateurs de performance de 1990 à 2007
Exercice financier |
Résultat global des indicateurs mesurés | ||||||
76% et plus | 51% à 75% | 50% et moins | Nb rôles | ||||
Nb rôles | % | Nb rôles | % | Nb rôles | % | total | |
1990 | 305 | 46% | 254 | 38% | 109 | 16% | 668 |
1991 | 308 | 50% | 233 | 37% | 81 | 13% | 622 |
1992 | 463 | 78% | 119 | 20% | 14 | 2% | 596 |
1993 | 440 | 80% | 94 | 17% | 13 | 2% | 547 |
1994 | 865 | 82% | 180 | 17% | 16 | 2% | 1061 |
1995 | 879 | 83% | 160 | 15% | 22 | 2% | 1061 |
1996 | 932 | 88% | 114 | 11% | 18 | 2% | 1064 |
1997 | 930 | 88% | 120 | 11% | 9 | 1% | 1059 |
1998 | 915 | 87% | 125 | 12% | 16 | 2% | 1056 |
1999 | 900 | 85% | 140 | 13% | 15 | 1% | 1055 |
2000 | 882 | 84% | 149 | 14% | 14 | 1% | 1045 |
2001 | 954 | 93% | 68 | 7% | 1 | 0% | 1023 |
2002 | 841 | 91% | 79 | 9% | 1 | 0% | 921 |
2003 | 803 | 92% | 63 | 7% | 6 | 1% | 872 |
2004 | 784 | 91% | 72 | 8% | 1 | 0% | 857 |
2005 | 774 | 90% | 82 | 10% | 3 | 0% | 859 |
2006 | 772 | 87% | 106 | 12% | 6 | 1% | 884 |
2007 | 767 | 89% | 85 | 10% | 8 | 1% | 860 |
Vérification de la qualité des rôles au moyen d’examens individuels
Le second volet du système de mesure de la qualité des rôles publié en 1989 consiste à approfondir l’examen des rôles dont les indicateurs de performance laissent présager des déficiences plus importantes. À caractère essentiellement préventif, selon la mission de soutien et d’assistance du MAM envers les municipalités, cet examen détaillé consiste en une consultation structurée de l’ensemble de la documentation supportant la confection et la tenue à jour du rôle examiné.
De 1991 à 1997, ce volet du système d’assistance et d’animation du MAM sur la qualité des rôles est appliqué à 72 rôles, pour chacun desquels un rapport écrit :
- dresse la synthèse des observations et analyses effectuées ;
- identifie les forces et les faiblesses quant à cinq aspects fondamentaux : l’inventaire immobilier à la base du rôle, les procédés d’évaluation utilisés, l’établissement de la proportion médiane, les valeurs établies en présence de marché et celles établies en absence de marché ;
- énonce une appréciation globale du niveau de qualité, ainsi que des recommandations quant aux actions pouvant accroître ce niveau, le cas échéant;
- est d’abord transmis à l’évaluateur signataire du rôle pour qu’il y ajoute ses propres commentaires et conclusions, puis finalement remis à l’organisme municipal responsable concerné.
À la suite d’une entente de partenariat conclue avec le MAM, l’Ordre des évaluateurs agréés du Québec intègre, à compter de 2003, la vérification des rôles d’évaluation foncière à ses activités d’inspection professionnelle. Ainsi :
- les rôles retenus pour examen sont choisis en tenant notamment compte des résultats des indicateurs de performance ;
- la procédure d’examen développée par le MAM est adaptée aux objectifs d’intervention de l’Ordre;
- le rapport d’inspection énonce des recommandations liées au respect du processus d’évaluation réglementaire et des normes de pratique en vigueur.
Jusqu’en 2011, 14 rôles d’évaluation sont soumis à cette inspection individuelle et 7 d’entre eux font ensuite l’objet d’une vérification de suivi.
Sources de référence utilisées aux fins de la présente capsule
- Code municipal de la Province de Québec, (34 Vict. c. 68), art. 737 et 738, sanctionné le 1870-12-24, https://books.google.ca.
- Rapport de la Commission royale d’enquête sur les problèmes constitutionnels, Volume III, Tome II, (Thomas Tremblay, prés.), février 1956, pp. 162 à 166 et 190 à 196.
- L’évaluation foncière pour fins municipales dans la province de Québec – Étude préparée pour la Commission royale d’enquête sur la fiscalité, Association des estimateurs municipaux du Québec, septembre 1964, pp. 43, 53 et 54.
- Rapport de la Commission royale d’enquête sur la fiscalité (Marcel Bélanger, prés.) Gouvernement du Québec, décembre 1965, pp. 291-292.
- Évaluation municipale au Québec, Jean B. Grenier, Les Estimateurs associés Inc., 1969, pp. 38 à 40 et 103 à 106.
- Méthode de mesure de la qualité des rôles, Louis-Marie Gagné, Le Faisceau, juin 1975, p. 9.
- Uniformisation des rôles d’évaluation pour fins scolaires – Guide à l’intention des évaluateurs responsables de l’uniformisation, Ministère de l’Éducation, décembre 1976, pp. 5 à 9.
- Réglementation sur le rôle d’évaluation foncière, Gazette officielle du Québec, 1983-11-09 G.O.2, 4464; 1989-06-21 G.O.2, 3144 ; 1994-09-21 G.O.2, 5702.
- La réforme administrative de l’évaluation foncière (Programme de formation des cadres municipaux), Ministère des Affaires municipales, mars 1977, pp. 42 et 93.
- Commentaires sur la proportion médiane des rôles d’évaluation déposés en novembre 1979, Jacques Piché, Le Faisceau, avril 1981, p. 11.
- Manuel d’évaluation foncière du Québec – Édition 1984, Annexe 6-C – Algorithmes de diagnostic du fichier 2.6.4 – Rôle d’évaluation foncière, pp. 3-4.
- Système de mesure de la qualité des rôles d’évaluation foncière – Document d’information à l’intention des évaluateurs, Ministère des Affaires municipales, juin 1989, 31 pages et 5 annexes.
- Règlement sur la retenue de sommes payables par le gouvernement en cas de contravention à certaines dispositions de la Loi sur la fiscalité municipale, Gazette officielle du Québec, 1989-08-09 G.O.2, 4471; 1995-05-03 G.O.2, 1914.
- La crédibilité des rôles d’évaluation ou les écuries d’Augias, Myroslaw Smereka, Le Faisceau, automne 1989, pp. 7 à 9.
- Mécanisme de vérification intégré de la qualité des rôles d’évaluation, Jean-Guy Kirouac É.A., revue L’évaluateur agréé, décembre 1989, pp. 81 à 83.
- Peut-on mesurer la qualité d’un rôle d’évaluation ?, Alain Raby É.A., revue Municipalité, décembre 1989, pp. 24 à 26.
- Les indicateurs de performance en évaluation foncière municipale – Compilation et analyse des résultats provinciaux, Ministère des Affaires municipales, Exercices financiers 1990 à 2007.
- Les nouveaux indicateurs de performance dans la mesure de la qualité des rôles pour 1994, Serge Paquin, Le Faisceau, printemps 1993, p. 5.
- Manuel d’évaluation foncière du Québec – Édition 1994, volume 2, chapitre 10-Les indicateurs de performance, pp. 10-3 à 10-7.
- La performance des rôles d’évaluation foncière : une évolution appréciable, Luc Sauvageau É.A., Le Faisceau, hiver 1994, pp. 3 à 5.
- Manuel d’évaluation foncière du Québec – Édition 1996, volume 2, chapitre 11-Équilibration du rôle d’évaluation, pp. 11-11 à 11-27 et 11-49 à 11-51.
- L’évaluation foncière : 25 ans après la réforme, un échec ou un succès?, Me Pierre Delisle, c.r., résumé de conférence présentée le 1996-10-23, pp. 7 à 9 et annexe III.
- Guide de pratique professionnelle, Ordre des évaluateurs agréés du Québec, août 1998, Norme 20, éléments 20.2.6 et 20.3.7.
- Rapport annuel de l’Ordre des évaluateurs agréés du Québec, années 2003-2004 à 2016-2017, Site web de l’OEAQ (www.oeaq.qc.ca), consulté le 2019-04-05.
- L’Ordre des évaluateurs agréés du Québec : L’inspection en évaluation municipale, bilan et perspectives, Christiane Guimond É.A. et Pierre Potvin É.A., Le Faisceau, hiver 2005, pp. 10 à 18.
- Évaluation foncière et fiscalité municipale (Bloc EMUN du programme de formation professionnelle), Ordre des évaluateurs agréés du Québec, novembre 2014, pp. 79.
- Conformité des rôles d’évaluation foncière, EFexpress no 19, MAMOT, 2015-06-25, p. 2.
[1] L’article 737 du Code municipal exige que tout conseil de comté examine tous les rôles d’évaluation faits dans les municipalités locales de son territoire, constate si l’évaluation faite dans chacune de ces municipalités locales est proportionnée à celle faite dans les autres, et augmente ou diminue, s’il en est besoin, le montant de l’évaluation portée au rôle de chacune de ces municipalités.
[2] Seul le terme « estimateur » désigne alors les personnes légalement responsables de dresser les rôles d’évaluation foncière des municipalités. Il est remplacé par le terme « évaluateur », introduit à compter de 1972 par la Loi sur l’évaluation foncière (LEF).
[3] L’uniformisation des rôles d’évaluation à des fins de taxation scolaire est instaurée en 1899 par la Loi de l’Instruction publique (62 Vict., c. 28) et s’applique aussi ensuite jusqu’en 1979. Ainsi, toute commission scolaire doit s’assurer que les rôles d’évaluation municipaux qu’elle est tenue d’utiliser comme base d’imposition correspondent à la pleine valeur réelle des propriétés. Cette opération nécessite d’abord une mesure de niveau fondée sur un nombre minimal de ventes (ou expertises), puis l’application d’un facteur global d’uniformisation aux évaluations produites par chaque municipalité.
[4] Cette conclusion s’appuie sur l’étude intitulée « L’évaluation foncière pour fins municipales dans la province de Québec », présentée à la Commission Bélanger en septembre 1964, par l’Association des estimateurs municipaux du Québec (AEMQ). On y indique notamment qu’en général, les rôles d’évaluation d’alors sont de piètre qualité et que, pour la majorité des municipalités, leur niveau est inférieur à 50% de la valeur réelle, ce qui témoigne d’une ignorance des prescriptions de la loi.
[5] En 1972, la LEF d’origine prescrit la valeur « marchande », jusqu’alors inédite dans la législation, comme référence des évaluations devant être inscrites aux rôles. Par souci d’éviter des divergences jurisprudentielles indésirables, la notion de valeur « réelle », connue en droit municipal depuis 1855, est réintroduite dans la LEF en 1973.
[6] Bien que le schéma du cheminement inclus à la réglementation édictée en 1977 illustre une étape intitulée « 16. Mesure de la qualité du rôle », aucune disposition législative ou réglementaire n’y fait référence. Cet élément n’est pas documenté non plus au MEFQ, ni dans tout autre guide administratif de cette époque.
[7] L’instauration d’un mécanisme annuel d’indexation de tous les rôles municipaux à la pleine valeur fait partie des propositions avancées par le gouvernement du Québec quant au projet de réforme fiscale, lors de la Conférence Québec-Municipalités des 9-10-11 juin 1978. Cette proposition évolue ensuite pour prendre la forme, en 1980, de la valeur uniformisée exigée à l’avis d’évaluation individuel, sans toutefois que le rôle d’évaluation soit modifié.
[8] Les dispositions législatives instaurant le régime des rôles triennaux permettent aux municipalités d’amorcer leur premier cycle triennal pour l’exercice 1989, 1990 ou 1991. À défaut, la loi impose 1992 comme exercice initial.
[9] Le « Règlement sur la retenue de sommes payables par le gouvernement en cas de contravention à certaines dispositions de la Loi sur la fiscalité municipale » (1989 G.O.2, 4471) s’applique aussi à compter de 1990. Il édicte notamment qu’une municipalité dont le rôle contrevient aux exigences sur l’équilibration perd le droit de recevoir, pendant trois ans, 10% des sommes à lui être versées par le gouvernement en vertu de divers programmes financiers (en-lieu de taxes, péréquation, etc.). Il est abrogé en mai 1995 (1995 G.O.2, 1914).
[10] Depuis 2015, le MAM n’avise plus les municipalités de la conformité de leur rôle aux exigences réglementaires sur l’équilibration. Seules les municipalités dont le rôle y contrevient en sont avisées.
[11] À l’édition 1996 du MEFQ, le processus d’équilibration du rôle est initialement décrit au chapitre 11 du volume 2. Depuis 2010, ce même contenu fait l’objet de la partie 3B de l’édition modernisée du Manuel.
[12] Depuis l’édition 1994 du MEFQ, les indicateurs de performance sont documentés au chapitre 10 du volume 2. Bien que prévu pour constituer la partie 5B de l’édition modernisée du Manuel, ce sujet en est absent depuis 2010.
[13] Les indicateurs de performance instaurés en 1990 sont d’abord rajustés pour 1991, après une première application. Une révision plus substantielle est ensuite effectuée pour 1994, notamment pour s’harmoniser aux modifications réglementaires sur l’équilibration, ainsi qu’aux changements méthodologiques apportés à l’établissement de la proportion médiane. Leur contenu demeure inchangé ensuite.
[14] Il est intéressant de souligner que, dans son étude soumise à la Commission Bélanger en 1964, l’AEMQ avance que la régie provinciale qu’elle propose prenne « certaines initiatives pour favoriser l’amélioration de la qualité des rôles. Avec les renseignements, statistiques et indices quant au degré d’uniformité des rôles dont elle disposerait, elle serait en état de découvrir quels sont les rôles les plus mal faits ».